Bienvenue aux premiers Jeux Olympiques cyborgs
Le professeur en robotique Robert Riener est à l’origine du premier Cybathlon, constitué d’épreuves réservées aux personnes appareillées. Interview.
L’ADN est partenaire de Futur en Seine, le rendez-vous de l’innovation qui a lieu du 9 au 19 juin 2016. Dans le cadre du festival, Robert Riener présentera le Cybathlon, une manifestation dédiée aux personnes appareillées et aux ingénieurs derrière les prouesses techniques des prothèses. « Je
voulais vraiment créer un événement qui puisse être une démonstration
de technologie, sortir les ingénieurs de leur laboratoire et les réunir
sur le devant de la scène avec les personnes appareillées. Il y a une
vraie vocation sociale ».
Robert Riener explique que jusqu’alors, les développeurs et les ingénieurs échangeaient très peu avec les patients. « La
technologie proposée ne répondait pas forcément à des besoins précis,
mais à leur idée de ce qu’était l’avancement technologique ». Faire
dialoguer dès le départ ceux qu’il appelle les « pilotes » et les
ingénieurs permet d’élaborer des appareils mieux acceptés et plus
utiles. En ce sens, le Cybathlon récompense une équipe : le pilote, et
le développeur.
« Je préfère parler de pilote plutôt
que de patients ou d’athlètes : nous mettons en avant des gens capables
de contrôler leur appareil. Ils doivent en être le maître, il y a un
équilibre à trouver ». En ce sens, les « épreuves » du Cybathlon
impliquent des tâches de la vie quotidienne. Il s’agira de montrer la
pertinence des appareils dans la vie de tous les jours : comment ils
peuvent permettre aux pilotes de préparer un petit-déjeuner (ouvrir un
pot de confiture, faire une tartine de beurre, couper du pain, servir un
verre de lait,…), ouvrir des portes, s’asseoir à table, porter des sacs
ou des boîtes,… « Nous voulons améliorer au maximum l’interaction
entre la technologie et l’utilisateur. Comment veut-il bouger ? A quelle
vitesse ? Plus les appareils sont automatisés, plus ils doivent être
adaptés ».
Pour Robert Riener, une vraie victoire serait que les utilisateurs puissent « oublier » leurs appareils. « Hollywood,
avec Iron Man par exemple, veut nous faire croire que les appareils
pourront créer des surhommes. Nous n’en sommes pas encore là : la
première étape est de rendre le quotidien fluide ». Lorsqu’il
évoque les appareils des athlètes paralympiques, Robert Riener souligne
qu’ils ne leur permettent d’effectuer qu’une seule tâche. « Il
faudra encore de nombreuses années avant que la technologie ne puisse
créer des supermen. Sans compter que cela pose des questions
d’éthique ». Il évoque l’exemple des exosquelettes, qui semblent être la panacée de l’armée. « Idéalement,
ils devraient permettre aux soldats de marcher plus vite, tout en
portant des charges lourdes. Ce n’est pas possible aujourd’hui, malgré
les investissements conséquents qui sont associés à la recherche. Il
faut faire attention : la technologie peut être utilisée à bon escient,
mais aussi pour faire la guerre. Il faut réglementer cela ».
Les innovations qui seront présentées lors du Cybathlon restent encore peu accessibles… « Les taux de production sont faibles, ce qui les rend coûteuses ».
Pour lui, il est nécessaire de concevoir des produits très
haut-de-gamme pour qu’une technologie abordable puisse être proposée. « C’est
aussi pour cela qu’il est important de démocratiser le sujet auprès du
public. C’est encore tabou, les gens n’ont pas conscience que de
nombreuses personnes doivent vivre avec un appareil, qui demande souvent
un investissement financier ».
Pour lui, le handicap ne doit pas être considéré comme quelque chose de mal. « Il faut réunir les gens, les faire bouger ensemble. La technologie permet cela ».
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