Captain Train, Withings… Une entreprise française en croissance peut-elle grandir seule?
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Rachat de Captain Train par le Britannique TrainLine, rachat de la pépite de l'IoT Withings par Nokia, rachat de la start-up Breaz par l'Américain Hired, reprise
de l'ESN Cegid par deux fonds anglo-américains… Les entreprises
françaises du numérique à fort potentiel n'auraient-elles que pour salut
le rachat par un groupe étranger? Ne peuvent-elles grandir et rejoindre
le club des leaders en restant 100% française?
Les analyses de Jean-David Chamboredon, président du fonds Isai et de Philippe Hayat, managing Partner à Serena Capital.
- Jean-David Chamboredon, président du fonds Isai:
Frenchweb: Pourquoi une entreprise digitale à fort potentiel ne peut-elle rester française?
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Jean-David Chamboredon, président du Fonds Isai:
Il est d'abord intéressant de noter que les rachats de Withings et
Captain Train qui sont de très belles transactions se font avec des
acheteurs Européens. C'est une première bonne nouvelle. La seconde c'est
que dans les deux cas, les équipes "product & engineering"
semble devoir rester en France pour sans doute y grossir. Enfin, ces
succès en appelleront d'autres: nul doute que les VCs et les
entrepreneurs concernés ré-investiront rapidement dans l'écosystème
digital Français…
Construire un leader continental ou mondial réclame de nombreux
ingrédients (dont notamment une conjonction de capital et d'accès aux
marchés internationaux dans le cadre d'un timing favorable)… On peut
penser que les dirigeants concernés ont estimé qu'ils donnaient plus de
chances au déploiement de leur projet industriel dans le cadre d'un
adossement à un groupe plus important qu'en restant indépendants…
D'autres ont eu ou auront l'opportunité d'aller plus loin en "stand alone"… Cette optionnalité est inhérente à tout projet entrepreneurial innovant !
Certes, le relatif manque de capital et de talents à dimension internationale sont sans doute deux points de faiblesse de notre écosystème. Petit à petit le niveau d'ambition collectif augmente, les savoirs-faire et les expériences se consolident… Ne soyons pas "party pooper": le fait que les opérations de M&A a plus de 100 millions d'euros (qu'on a pu compter sur les doigts d'une main lors de la précédente décennie) se multiplient est très certainement un indice de progression très forte de notre écosystème !
Certes, le relatif manque de capital et de talents à dimension internationale sont sans doute deux points de faiblesse de notre écosystème. Petit à petit le niveau d'ambition collectif augmente, les savoirs-faire et les expériences se consolident… Ne soyons pas "party pooper": le fait que les opérations de M&A a plus de 100 millions d'euros (qu'on a pu compter sur les doigts d'une main lors de la précédente décennie) se multiplient est très certainement un indice de progression très forte de notre écosystème !
- Philippe Hayat, managing Partner de Serena Capital
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Je relève plusieurs handicaps auxquels nos entreprises françaises sont confrontées. Tout d’abord, les sociétés françaises ont structurellement beaucoup de mal à passer les frontières pour conquérir l’Amérique et l’Asie. Il y a clairement un problème de taille de marché entre le marché domestique et le marché mondial. La France est un très petit marché. De fait, réussir en France ne donne pas d’office la légitimité pour réussir dans le monde. On vit ce que vivent d’une certaine façon les start-up israéliennes. Le fait qu’une entreprise vienne de France ne veut pas dire que la réussite sera mondiale alors qu’aux US le marché étant très gros permet dès le départ, de bénéficier une vraie preuve de concept. On peut-être un champion français et être encore un «nain» mondialement. Les grosses success stories françaises qui ont réussi mondialement, ce sont installées tôt aux US et ont levé des fonds auprès de fonds d’investissement américains. Il est nécessaire de penser international dans la réflexion de l’activité et du business model d’une entreprise.
Le deuxième handicap est le manque de financement/ de capitalisation très fort. Aujourd’hui, les grosses levées de 50-100 millions d’euros ne se trouvent pas sur le marché français. De fait, les sociétés qui naissent en France naissent peu capitalisées. C’est l’inverse de ce que vivent les sociétés américaines. Mais le marché du venture et capital-risque s’organise d’année en année en France. On a de plus en plus matière à financer une entreprise dès son plus jeune âge. Cela évolue donc dans le bon sens.
Le troisième handicap est un problème culturel, mais celui-ci s’atténue petit à petit. Jusqu’à aujourd’hui, les sociétés françaises, à forte croissance ont culturellement beaucoup de mal à surmonter l’ouverture de leur capital et à exporter. Il y a également la barrière de la langue avec une réelle faiblesse, de la part des Français, à parler les langues étrangères et à comprendre les cultures locales. Un exemple de différence notable : dès leurs études, les Israéliens sont éduqués à faire du business development à l’étranger. C’est donc par nature dans leur ADN. Un entrepreneur israélien pensera toujours international. En France, cela ne fait pas partie de nos réflexes mais il y a une évolution dans ce sens car toutes les écoles d’ingénieurs et de commerce obligent désormais leurs étudiants à faire des séjours à l’étranger. De ce fait, la nouvelle génération pense de plus en plus internationale.
Pour les trois raisons évoquées ci-dessus, il est difficile de créer des leaders en France dans le digital. Quand elles atteignent une certaine taille, nos entreprises laissent la main à une plus grosse structure (multinationale ou société américaine) qui à la dimension pour en faire un champion mondial et qui va les accompagner fortement dans son développement international. Par exemple, Vente-privée qui est un champion mondial, rentable et en forte croissance n’arrive pas malgré cela à devenir un Alibaba ou Amazon… Nos entreprises ont malheureusement, à ce jour, du mal à conquérir les principaux marchés, à exporter leur savoir-faire, à étendre leur activité. Soit elles finissent par se faire racheter pour qu’une plus grosse structure les développe, soit elle change de pays (cf Vente-Privée). Peu d’entreprises françaises hors multinationales, à ce jour, ont réussi à conquérir le marché américain. Il y a donc encore à ce jour des freins culturels, de financement/ fonds propres et de marché que l’on va devoir surmonter rapidement.
- Les Français rachetés:
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Jeanne Dussueil
Journaliste chez Adsvark Media / FrenchWeb - We Love Entrepreneurs
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