Numérique : les nouveaux chemins de la citoyenneté http://www.influencia.net/fr
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David Lacombled
Il est Directeur délégué à la stratégie de contenus pour Orange
Publié le 28/08/2016
Faire du web et des réseaux
sociaux un espace de citoyenneté est un enjeu collectif, mais qui passe
par chacun d'entre nous. Une des clés : une meilleure compréhension de
ses codes (sociaux) et de son code (numérique) pour construire un
écosystème du vivre ensemble. C'est avant tout un enjeu d'éducation, et
dont les lignes qui suivent pourraient être le manifeste.
Comme lors des attentats de janvier 2015 contre Charlie Hebdo et l’Hyper Casher,
Internet et les réseaux sociaux ont été au cœur même des événements qui
ont secoué la France le 13 novembre. Encore une fois, les réseaux
sociaux ont été dès le commencement aux avant-postes en donnant minute
par minute (notamment sur Twitter) des informations sur ce qui était en
train de se passer à Paris. Puis, aussitôt, la solidarité et l’échange
se sont invités, démontrant ainsi que les réseaux sociaux, outre leur
rôle d’information, possèdent une dimension sociale forte. Ce fut le cas
avec le hashtag #PortesOuvertes, qui a émergé instantanément sur Twitter,
où certains offraient spontanément la possibilité à ceux qui se
trouvaient sur les lieux des événements de venir se réfugier chez eux.
De même, le « Safety Check » mis en place par Facebook le soir même a permis à chaque membre habitant Paris de se signaler afin de rassurer ses proches et ses amis sur sa situation.
Le coeur « virtuel » du collectif
S’ils ont été au cœur des événements, les réseaux sociaux ont aussi été le cœur des événements. Immédiatement, Facebook, Twitter, Instagram se sont mués en « chapelle ardente »,
où les messages de sympathie, d’empathie, de solidarité et de soutien
se sont échangés. À #JeSuisCharlie a succédé #JeSuisParis. Le symbole Peace for Paris, variation du Peace and Love, une tour Eiffel enchâssée dans le signe de la Paix, dessiné par l’illustrateur Jean Jullien
est devenu le signe de ralliement. Les photos de profil se sont
subitement parées d’une trame bleu blanc rouge en signe de solidarité
internationale et de fierté française…
Ce partage émotionnel via les réseaux,
s’il avait été très important en janvier, a été tout simplement vital en
novembre. Tout type de rassemblement étant rendu impossible du fait de
la mise en place de l’état d’urgence et annulant de fait une grande
marche unitaire comme celle du 11 janvier 2015 – qui avait permis de
cristalliser et d’incarner le sentiment d’appartenance –, les réseaux
sociaux ont joué pleinement ce rôle fédérateur.
Imagine-t-on ce que cela aurait été sans Facebook, Twitter, Instagram
et autres ? Comment aurait pu s’exprimer ce vif besoin de partage et de
solidarité ? Comme le remarque le sociologue et spécialiste des réseaux
sociaux Benjamin Loveluck, dans une interview à M, le magazine du Monde, le « like » dans ces moments tragiques est devenu « une main sur l’épaule virtuelle ».
La dimension de tous les possibles
On a pu, ici ou là, reprocher aux
réseaux sociaux de se réduire à une pure approche compassionnelle.
Peut-être… Mais l’empathie n’a pas la prétention de résumer l’engagement
en entier. Elle n’en est qu’un moment. Et quand bien même, si c’était
le cas, n’est-ce pas aussi par ce lien émotionnel que prend naissance
l’expression de la citoyenneté ? Comme une première étape, celle du
sentiment d’appartenance à une communauté. Une première étape nécessaire
comme la conscience d’un enjeu collectif.
Car les réseaux sociaux sont souvent
décriés comme porteurs d’expressions individualistes, voire
narcissiques. Et dès que des événements cruciaux adviennent, ils
apportent la preuve que ces mêmes réseaux n’usurpent pas le qualificatif
de « sociaux ». Ils démontrent qu’ils sont capables d’assumer
une dimension collective et constructive. Au-delà de la compassion, ils
sont aussi le lieu d’enjeux collectifs et le vecteur d’actions
citoyennes, comme les pétitions en ligne, des mouvements de
solidarisation pour une cause, des entrées pour le financement
coopératif de projets, le crowdfunding, des appels à l’engagement…
Pour autant, il ne s’agit pas
d’idéaliser. Dans le même temps, avec une concordance frappante, la
réalité nous montre que les réseaux sociaux et Internet hébergent
également des messages de dérives, de dérapages, des expressions de
haine… Alors, avec la même régularité, apparaît aussi le cortège de ceux
qui tiennent le coupable idéal : Internet et les réseaux sociaux, la
source de tous les maux et de toutes les dérives. Et de reprendre le
même chapelet de propositions visant à encadrer et à mettre sous
contrôle Internet.
Outre que cela est totalement
irréalisable – la ligne Maginot semble avoir encore ses adeptes ! –,
cela n’empêchera pas les dérives d’exister. Qu’il faille en appeler à la
responsabilité de certains acteurs du Net est une chose, mais penser
contrôler et sélectionner ce qui se dit ou s’écrit sur Internet est
utopique et nous mènerait tout droit à la dystopie. Quelle citoyenneté
serait encore possible dans un lieu où tout est mis sous coupe réglée ?
Internet est par essence un espace de liberté. C’est dans cet espace
ouvert, qui s’invente et se réinvente en permanence, que la citoyenneté
peut et doit s’exercer.
David Lacombled
Il est Directeur délégué à la stratégie de contenus pour Orange
Numérique : les nouveaux chemins de la citoyenneté
Publié le 28/08/2016
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