Anne-Sophie Vion / Journaliste |
Des produits permettent aux particuliers d’investir au capital d’entreprises qui contribuent à la transition énergétique et à la lutte contre le changement climatique.
De nombreuses PME tricolores innovantes jouent
un rôle en matière de lutte contre le dérèglement climatique. Elles
sont même, pour certaines, des leaders à l’international. Au travers de
leurs investissements, les particuliers peuvent soutenir leur
développement et bénéficier de leur croissance. Aux côtés d’un éventail de placements boursiers dédiés aux valeurs vertes , des fonds de private equity
consacrent une part plus ou moins importante de leurs participations au
financement de l’économie verte et durable. Certains produits sont
ouverts aux particuliers depuis déjà plusieurs années. Car l’implication
du métier du capital-investissement dans l’économie verte est ancienne.
La filière des entreprises dites « écologiques » a en effet, de longue
date, eu besoin du soutien à la fois du private equity, des marchés financiers et des politiques publiques pour assurer son essor.
Une famille hétérogène de produits
La
thématique environnementale recouvre une variété de secteurs
d’activité. Parmi les principaux, les énergies renouvelables,
l’efficacité énergétique, les transports propres, la gestion des déchets
et le traitement de l’eau. En miroir, les fonds de
capital-investissement « verts » misent sur tout ou partie de ces
segments. Acteur de cette niche de marché, Omnes Capital, actif depuis
2006 dans les énergies renouvelables, a réalisé plus de 30
investissements verts en France et en Europe. La société de
capital-investissement lance, cette année, son troisième fonds dédié à
la classe d’actifs des énergies renouvelables. Avec un objectif
d’environ 200 millions d’euros sous gestion, Capenergie 3 vise à «
prendre des participations majoritaires dans des projets de production
d’énergie verte, fondés sur des technologies matures, en France et en
Europe de l’Ouest », détaille Serge Savasta, associé gérant chez
Omnes Capital. C’est aussi le premier fonds dédié aux énergies
renouvelables à bénéficier du plan Junker en France avec un engagement
de la BEI (Banque européenne d’investissement) à hauteur de 50 millions
d’euros.
Dans le cadre du précédent
véhicule, Capenergie 2, Omnes Capital a, par exemple, investi fin
décembre 4 millions d’euros dans une installation géothermique, dont il a
vocation à détenir 51 %, et qui constitue le premier réseau de chaleur
en portefeuille. Pour la conception, la construction, le financement et
l’exploitation, Omnes Capital s’est associé à Kyotherm, et à deux
filiales du Groupe Engie (ex-GDF Suez), Cofely Réseaux et Storengy. Le
réseau alimentera Villages Nature, future destination écotouristique à
Marne-la-Vallée, dont l’ouverture au public est prévue en 2016. Les
particuliers peuvent accéder au fonds Capenergie 3, qui a la structure
juridique d’un FPCI (fonds professionnel de capital-investissement), à
partir d’un ticket d’entrée significatif, de 250.000 euros. Ce placement
est réservé à des investisseurs qualifiés. Il ouvre droit, sous conditions, à un avantage fiscal à la sortie : exonération d’impôt sur le revenu sur les plus-values.
A retenir
. Quoique de taille encore modeste, environ 5 % de la collecte totale du
private equity, le secteur des cleantech français est plein de
vitalité. Au 1er semestre 2015, les levées de fonds dans les «
technologies propres » représentent un montant global de 243,5 millions
d’euros qui irriguent 41 cleantech, en hausse de 40 % par rapport à la
même période de 2014. Ces chiffres sont issus du baromètre réalisé par
le club cleantech de l’Afic (Association française des investisseurs
pour la croissance) avec le site GreenUnivers et le cabinet EY. Créé il y
a cinq ans, ce club compte une cinquantaine de membres.
. Le segment des énergies renouvelables, avec celui de l’efficacité énergétique, concentrent 70 % des montants investis au premier semestre 2015 par le capital-investissement tricolore dans les cleantech et plus de la moitié des entreprises financées.
. L’environnement couplé à l’énergie arrive au 3e rang des secteurs cibles d’investissement des FCPI, soit 28 millions d’euros et 13 % du total des montants collectés en 2014.
. Le segment des énergies renouvelables, avec celui de l’efficacité énergétique, concentrent 70 % des montants investis au premier semestre 2015 par le capital-investissement tricolore dans les cleantech et plus de la moitié des entreprises financées.
. L’environnement couplé à l’énergie arrive au 3e rang des secteurs cibles d’investissement des FCPI, soit 28 millions d’euros et 13 % du total des montants collectés en 2014.
Les
épargnants peuvent aussi allouer leur argent au capital de sociétés
dont l’activité est liée à l’économie verte par l’intermédiaire de fonds
davantage « grand public », FCPI (fonds communs de placement
dans l’innovation) et FIP (fonds d’investissement de proximité). Ces
placements de non-coté, également assortis de réductions fiscales
attrayantes de l’IR ou de l’ISF, sont accessibles à partir d’une mise de
départ plus légère, dès 500 euros. Spécialiste des FCPI et des FIP,
123Venture intervient dans le financement de sociétés de production
d’énergies renouvelables depuis 2008 et au travers de véhicules variés
(FIP, FCPR, club deals).
La société a investi dans 35 parcs éoliens et 115 centrales solaires en
France, représentant une puissance cumulée de 700 MW et un
investissement de 1,5 milliard d’euros. Une gamme de FIP, dont 123
Multi-Energies et 123 Multi-Energie II, créés respectivement en 2009 et
2010, sont dédiés à la thématique. Ces fonds détiennent un portefeuille
de centrales photovoltaïques, éoliennes et biogaz désormais toutes en
exploitation.
Labels en vue dans le cadre de la COP21
« Nous avons même déjà cédé les premières participations de ces fonds, détaille Jean-Philippe Olivier, membre du directoire chez 123Venture. Elles
sont positives. Les deux FIP, qui seront entièrement débouclés d’ici à
deux ans, affichent des performances satisfaisantes. » Sélectif
dans le choix des projets, le gestionnaire en aura retenu une douzaine
parmi plus de 250. Contre une durée de détention comprise entre cinq et
huit ans, la rentabilité nette de la classe d’actifs oscille entre 6 et 8
% par an. Aujourd’hui, 123Venture s’apprête à lancer deux nouveaux
fonds et étudie leur labellisation dans le cadre de la COP21 .
D’autres gestionnaires de FCPI et de FIP prennent, au sein de portefeuilles diversifiés
entre une variété de secteurs innovants, quelques participations en
lien avec le thème de l’économie verte. C’est ainsi le cas d’Inocap qui
investit depuis plusieurs années, par le biais de FCPI, dans des jeunes
pousses devenues PME, comme Orège, spécialisée dans les traitements
complexes de l’eau municipale et des rejets industriels toxiques non
biodégradables et Environnement SA, leader mondial de la mesure des
particules fines.
Des marchés très spéculatifs
En
plaçant leur épargne dans le non-coté vert, les particuliers entrent au
capital de sociétés dont l’activité est principalement liée aux
énergies renouvelables, mais pas seulement. « Depuis cinq ans, observe Sophie Paturle, présidente du club cleantech de l’Afic,
les montants investis par les acteurs du capital-investissement
français dans les entreprises cleantech ont été multipliés par deux. Ce
secteur, en forte croissance, gagne aussi en maturité. La palette
d’activités économiques vertes s’est élargie. Les énergies renouvelables
ont longtemps représenté la moitié des investissements. Elles sont
désormais dépassées par le segment de l’efficacité énergétique. Le
solaire monte en puissance et la biomasse, en raison de la baisse des
coûts de production, émerge. »
La
déferlante de produits dédiés aux valeurs vertes, cotées ou non, appelle
à la vigilance. Confronté à un vaste fourre-tout, l’investisseur doit
trier le bon grain de l’ivraie. De très belles sociétés, des champions
mondiaux, côtoient des PME sans véritable business model et
survalorisées. Pour mieux flécher l’épargne des Français en faveur de
fonds qui financent - vraiment - la transition énergétique et la lutte
contre le changement climatique, le gouvernement vient de lancer un
nouveau label, avec une nomenclature très précise.
Les rendements s’améliorent
Peut-on
gagner de l’argent en investissant dans la croissance verte ?
Globalement, les marchés des énergies propres sont très spéculatifs. En
vedette à la fin des années 90, les actions d’entreprises « écologiques »
ont connu des revers de fortune à chaque baisse du prix du pétrole. En
2008, les énergies renouvelables ont payé un lourd tribut à la crise
financière mondiale. Certaines sociétés, en particulier dans le solaire,
ont perdu jusqu’à 90 % de leur valeur. La raréfaction du crédit a alors
pénalisé toute la filière. Mais, fin 2008, la classe d’actifs s’est
réappréciée, alors stimulée par les différents plans de relance
économique dans le monde, qui intégraient une composante « verte ».
Depuis, à chaque rigueur budgétaire, quand les niches fiscales vertes
sont revues à la baisse, l’embellie boursière des valeurs vertes est à
nouveau mise à mal.
Concernant les cleantech, explique Sophie Paturle, « les rendements s’améliorent. On commence à voir de la création de valeur.
D’ailleurs les industriels s’intéressent de plus en plus à l’innovation
des entreprises vertes. Ils souscrivent à des fonds dédiés ou
investissent directement dans les tours de table de start-up en accompagnant des professionnels de l’investissement. »
Si
la thématique de la transition énergétique et de la lutte contre le
changement climatique, au sens large, est source d’opportunités
d’investissement, il faut donc être prudent. L’exposition doit rester
modérée, uniquement à titre de diversification et pour un horizon de
placement long.
Capture d'écran: http://patrimoine.lesechos.fr/patrimoine/immobilier/index.php |