Au
deuxième trimestre 2015, les retards de règlement des entreprises
françaises ont atteint leur niveau le plus critique à 13,6 jours. Si à
fin septembre, la dégradation s’est arrêtée et le retard moyen global
s’est fixé à 13,2 jours, Thierry Million, Directeur des études Altares,
ne se satisfait pas pour autant du résultat. Il déclare : «
l’inversion de la courbe est encore trop timide pour confirmer un retour durable vers de meilleures pratiques commerciales ».
Il faut dire que le retard moyen est encore bien au-dessus du seuil des 12 jours franchi un an auparavant et qu'«
apprécié sur les seules factures en retard de règlement, le délai additionnel est même de 20,8 jours » ajoute M. Million.
7,5% des entreprises présentent des retards supérieurs à 30 jours contre
8% le trimestre précédent, et 36,2% des organisations payent leurs
factures à temps contre 36,5% trois mois plus tôt. Si les retards sont
moins fréquents, il en est de même pour les règlements effectués en
temps et en heure.
En ce qui concerne les retards inférieurs à 15 jours, le tiers des
entreprises en sont coutumières contre 27,4% en Europe : la France
maintient ainsi son titre de « championne d’Europe des petits retards ».
Le secteur public se distingue pour ses retards de paiement
Dans le secteur privé, ce sont les entreprises de plus de 20 salariés
qui ont amélioré le plus leurs comportements de paiement en passant de
14,9 jours à 13,9 jours de retard.
En moyenne, les sociétés commerciales comptent sur une moyenne de 13,4
jours de retard, les entreprises de plus de 250 salariés étant les plus
concernées par les retards de règlement (14,7 jours).
«
Les entreprises de petite taille sont moins tentées de recourir au
crédit fournisseur, d’autant que le rapport de force leur est
défavorable. Lorsque la petite entreprise peut payer ses fournisseurs,
elle le fait généralement à l’échéance de la facture sans chercher
délibérément à gagner quelques jours de trésorerie. En revanche,
lorsqu’elle est financièrement plus tendue, la microentreprise va
reporter plus franchement ses règlements. Les petites sociétés de mois
de 3 salariés sont trois fois plus nombreuses à reporter leurs paiements
de plus de 30 jours que celles de plus de 250 salariés (8,7 % contre
2,6 %) », explique M. Millon.
Le secteur public, exposé à un plus grand nombre de procédures et de
contraintes budgétaires, n’arrive pas toujours à gérer leurs recettes.
Les organisations publiques de plus de 20 agents sont celles qui «
dérapent
» le plus. Le retard moyen est de 17 jours pour les EPIC ou
l’administration de l’Etat. Même tendance pour les collectivités locales
: les plus petites se maintiennent à 10 jours de retard tandis que les
plus grandes atteignent 19 jours en moyenne.
Des retards qui varient selon le secteur d’activité et la région
L’étude souligne que «
la plupart des activités s’inscrivent dans une tendance de faible amélioration des comportements de paiement » à l’image de l
’industrie manufacturière
dont le retard de règlement est repassé sous les 12 jours à 11,7 jours.
Toutefois, seuls 28,7% des industriels respectent les délais de
paiement.
Le
commerce en détail est le meilleur élève puisque 40%
des règlements sont effectués à l’heure et le retard moyen est de 12,5
jours contre 13 au trimestre précédent.
Le résultat obtenu par les
débits de boisson est
également satisfaisant puisque 43,9% des paiements sont réalisés sans
retard tandis que le report moyen de règlement a reculé de 2 jours par
rapport aux trois derniers mois.
Le
transport routier de marchandises, l’
élevage et les
services informatiques et édition de logiciels
sont les secteurs d’activité dont les retards de règlement sont les
plus élevés à savoir 16,5 jours, 15, 5 jours et 14,7 jours.
Plus d’un éleveur sur dix reporte ses paiements de plus de 30 jours,
moins d’un quart des factures du secteur des transports routiers sont
payées à date tandis que seuls 24,8% des règlements sont effectués à
échéance dans l’informatique et l’édition de logiciels. Le
commerce du gros respecte également les dates de factures dans une moindre mesure (27,1%) pour un retard moyen de 13,1 jours.
Le Limousin est la région qui accuse le moins de retard de paiement
(47%), suivi des régions Poitou-Charentes (45,4%), Bourgogne (41,9%),
Franche-Comté (41,8%) et Auvergne (41,1%).
Au niveau européen, le Portugal est maître des retards avec 29,7 jours
suivi par l’Italie (19,9), le Royaume-Unis (18,3), l’Irlande (17,1) et
l’Espagne (16,2). L’Allemagne et les Pays-Bas restent sous la barre des
10 jours avec 6,4 et 8,5 jours de retard respectivement.
Entrer dans l’ère digitale, une solution optimale ?
Thierry Millon considère que le digital permettrait de réduire considérablement les retards de paiement, «
le
non-respect des délais légaux tenant parfois à des documents de
facturation non conformes ou incomplets. La digitalisation de la chaine
des paiements, voire de tout le cycle transactionnel, tend à
rationaliser les processus, minimiser les litiges, accélérer les
règlements et sécuriser la relation ».
Altares estime ainsi qu’il faut dématérialiser les commandes et les
factures, mettre en place une plateforme d’échanges entre clients et
fournisseurs pour fluidifier le traitement de la chaine de facturation,
ainsi qu’un levier de maîtrise des coûts.
«
En France, les grandes entreprises fournisseurs de l’Etat ont pour
obligation de passer à la dématérialisation de leurs factures au 1er
janvier 2017, avant d’être rejoints par les ETI en 2018, et les PME en
2019 puis les micro-entreprises au 1er janvier 2020. Cette résolution
participe à moderniser la relation entre les entreprises et
l’administration. Il s’agit de convertir des processus achats souvent
contraignants en performance financière agile et durable pour tous les
acteurs économiques », conclut Thierry Millon.
R.C
Images : ©Altares