Il existe toujours un décalage
entre la réalité d’une situation et l’opinion qu’on s’en fait. Selon les
sujets ou les pays cet écart affiche une grande variation. Mais sur
quel thème et jusque dans quelle mesure? C’est ce que révèle Réalité vs.
Perceptions, l’enquête internationale menée par Ipsos. Avec un focus
sur la France qui peut mieux faire.
A longueur de journée à travers leurs
expériences, leur vécu, les médias ou les canaux digitaux, les Français
reçoivent un flux permanent d’informations. Souvent le tri est fait au
profit d’un jugement censé sur ces problématiques sociétales,
économiques et politiques. Mais parfois à coups d’images, de débats, de
crises, d’analyses, de chiffres plus ou moins bien réalisés et plus ou
moins bien assimilés, les fausses idées se forment. Au point de renvoyer
à une opinion bien éloignée de la réalité. Qui peut faire long feu tout
en confinant aux préjugés.
IPSOS s’est penché sur la question dans
Réalité vs. Perceptions
son enquête annuelle et fait l’état des lieux dans 32 pays (*). Et si
les Coréens du Sud, les Irlandais et les Polonais constituent le peloton
de tête en affichant un indice de précision très correct dans leur
jugement. Il n’en est rien pour les Brésiliens, les Indiens et les
Mexicains, bons derniers, tant leurs préjugés sont fortement ancrés
(voir tableau ci-dessous). De leur côté, en occupant la 7ème place
-coincés entre les Suédois et les Norvégiens- les Français sont
relativement lucides, néanmoins, ils peuvent certainement mieux faire.
Les principaux enseignements révélant, en effet, que nous nous méprenons
sur de nombreux sujets. Ainsi, la richesse des ménages les plus aisés
est largement surestimée, tout comme l’immigration. A l’inverse,
l’obésité, les pratiques religieuses et la désertification des zones
rurales ont bien plus d’ampleur que ne le pensent nos compatriotes.
Revue de détail des 10 thématiques étudiées par la société d'études.
Les Français se méprennent fortement sur de nombreux sujets
La richesse : l’argent
est un sujet épineux que les Français abordent souvent avec beaucoup
d’imprécisions. l' enquête indique ainsi que nous surestimons fortement
la proportion de richesse détenue par le 1 % des ménages les plus aisés.
Les Français pensent ainsi en moyenne que cette toute petite partie de
la population représenterait plus de 50 % des richesses du pays alors
qu’elle est en réalité de 23 %. Lorsque les répondants sont interrogés
sur le pourcentage que DEVRAIT détenir selon eux ce 1 % des ménages les
plus aisés, ils répondent en moyenne 27 %, soit une donnée qui se
rapproche du chiffre réel.
L’obésité : le poids
est un problème de santé publique croissant, mais les résultats de
l’enquête suggèrent que nous ne nous en inquiétons pas autant que nous
le devrions. Nos compatriotes pensent ainsi que 32 % des personnes âgées
de plus de 20 ans sont en surpoids ou obèses, alors que la réalité est
beaucoup plus alarmante : près d’un Français sur 2 se trouve être en
situation de surpoids ou d’obésité (49 %).
La population non croyante : dans la précédente édition de
Réalité vs. Perceptions
(2014), l''étude avait déjà mis en exergue les préjugés des Français
concernant les pratiques religieuses dans notre pays (notamment la
surestimation du nombre de musulmans et la sous-estimation du nombre de
chrétiens). L’édition 2015 de l' enquête montre également que les
Français surévaluent fortement la proportion de personnes athées,
agnostiques ou ne se reconnaissant dans aucune religion- estimée en
moyenne à 46 %, alors que le chiffre réel de non-croyants en France
n’est que de 28 %, soit près d’un quart de la population française.
L’immigration : les
résultats de l’enquête 2014 reflétait déjà la préoccupation des Français
sur la question de l’immigration. Il n’y a aucun changement perceptible
à ce sujet puisque nous surestimons toujours de 14 points la population
immigrée en France, soit presque le double du chiffre réel (21 % au
lieu de 12 en réalité).
Génération « Tanguy » :
probablement en réponse à cette inquiétude liée aux difficultés des
jeunes à trouver un travail et par extension un logement, nous
surestimons énormément cette génération « Tanguy », adultes de 25 à 34
ans qui vivent encore chez leurs parents. L’estimation moyenne atteint
36 %, soit trois fois plus que le chiffre réel qui est de 11 %.
La population âgée de moins de 14 ans
: en dépit de notre perception que la population est en moyenne plus
âgée qu’elle ne l’est en réalité, les Français surestiment également la
proportion de jeunes âgés de moins de 14 ans (27 %) alors qu’elle ne
constitue que 19 % de la population française.
Les femmes politiques :
il reste encore un long chemin à parcourir avant d’atteindre la parité
homme-femme parmi nos élus et la plupart des Français en ont pleinement
conscience, ce qui explique une estimation moyenne (28 %) qui se
rapproche de la situation réelle (26 % de nos représentants sont des
femmes).
L’emploi des femmes :
les Français jugent à raison que la plupart des femmes travaillent, bien
qu’ils en surestiment légèrement le chiffre réel. En moyenne, nous
pensons que 66 % des femmes en âge de travailler occupent un emploi
alors qu’elles sont en réalité 61 % à avoir une activité.
La vérité est-elle dans le pré ?
: Eh non, là aussi les Français s’éloignent de la vérité. En effet, la
France ne se résume pas seulement à Paris et aux grandes villes ! Les
Français le pensent si fort qu’ils surestiment très largement le nombre
de leurs concitoyens vivant en zones rurales (43 % vs. 21 % de la
population vivant à la campagne).
L’accès à Internet : la
forte démocratisation de l’accès à Internet constatée au cours des
dernières années est parfaitement avérée, mais les Français
sous-évaluent encore légèrement son étendue. En moyenne, nous estimons
que huit Français sur dix (80 %) ont accès à Internet à domicile via un
ordinateur ou un terminal mobile alors que le chiffre réel est de 86 %.
(*) 25 556 interviews réalisées entre le 1er et le 16 octobre 2015.