Quels sont les
risques liés aux crypto-monnaies ? Le directeur d’un fonds
d’investissement présente les 3 principales menaces auxquelles sont
confrontés les épargnants
Dans le cadre d’un entretien récemment accordé à Business Insider,
Ari Paul, le directeur des investissements du fonds BlockTower Capital,
a évoqué les principaux risques liés à l’investissement dans les
crypto-monnaies.
1. Les risques d’investissement
Pour M. Paul, le premier risque est un
risque d’investissement. Il s’agit du
risque de perte en capital lié à la forte volatilité des crypto-monnaies.
Il suffit de s’intéresser aux évolutions du cours du Bitcoin pour constater que celui-ci est sujet à
de fortes variations. Au début du mois de décembre, la monnaie numérique s’échangeait à environ 10 000 dollars,
avant que sa valeur ne double en moins de 3 semaines.
Une frénésie s’était emparée du Bitcoin. Le
Chicago Board Options Exchange et le
Chicago Mercantile Exchange, les deux plus grandes bourses d’échange au monde, avaient lancé leurs
contrats à terme sur la crypto-monnaie. La société Nasdaq avait indiqué qu’elle comptait s’y mettre elle aussi dès 2018, et certaines sociétés d’investissement
avaient formulé de nouvelles demandes visant à introduire des ETFs adossés au BTC.
Le Bitcoin était sur la route de la démocratisation, et l’avenir semblait radieux.
Jusqu’à la journée d’hier.
Le Bitcoin est ainsi
retombé à 12 000 dollars vendredi matin, affichait une
baisse de 40% par rapport au record historique atteint seulement quelques jours plus tôt.
Plutôt que d’y voir un “krach”, de nombreux observateurs estiment qu’il s’agirait d’
une correction “saine”, alors que le cours de la monnaie virtuelle a été
multiplié par 20 depuis le début de l’année.
Pour M. Paul,
ces fortes variations de prix font partie intégrante de l’investissement dans les crypto-monnaies. Elles sont généralement beaucoup plus importantes que celles que l’on peut retrouver sur les marchés financiers “classiques”.
De notre côté, nous pensons que les investisseurs doivent bien comprendre une chose :
lorsqu’ils placent de l’argent dans les crypto-monnaies, leur capital est à risque.
Car il est impossible de pouvoir bénéficier d’une performance élevée
sans que celle-ci ne soit associée à un risque élevé.
Il convient donc de ne placer
qu’une petite partie de son patrimoine dans des actifs aussi volatils, et de
diversifier ses investissements en se tournant majoritairement vers des supports moins risqués.
Pour cela, l’épargnant devra déterminer au préalable
le niveau de risque qu’il est prêt à accepter, en comprenant bien qu’il s’expose à la perte de l’ensemble des sommes qu’il aura investies dans les crypto-monnaies.
Enfin,
le
fait que le cours d’une crypto-monnaie ait fortement augmenté durant
plusieurs mois ne signifie pas qu’une telle tendance haussière va
nécessairement se poursuivre. Ce n’est pas parce que le Bitcoin
s’est apprécié de près de 1 500% depuis le début de l’année qu’il
affichera des performances similaires en 2018.
En France,
l’Autorité des Marchés Financiers contraint d’ailleurs les sociétés qui
souhaitent faire la publicité d’un placement d’y apposer la mention
suivante : “
les performances passées ne préjugent pas des performances futures“.
2. Des risques opérationnels
L’autre risqué lié à l’investissement dans les monnaies numériques est ce que l’on appelle un
risque opérationnel.
En clair, celui-ci est
lié à la façon dont les agents économiques interagissent avec leurs crypto-monnaies. Ceci peut concerner leur stockage, leur transfert vers d’autres portefeuilles, leur conversion en monnaies fiduciaires,…
Pour M. Paul,
le risque le plus important est lié au stockage.
Autrement dit, c’est la manière dont vont être stockées les
crypto-monnaies des épargnants qui va avoir l’impact le plus fort sur
les risques auxquels ceux-ci s’exposent.
Voici ce qu’il a déclaré :
“Il
s’agit d’une cible de choix pour les hackers, d’une cible pour les
voleurs, notamment les ‘insiders’. Et suite à une attaque de grande
envergure, il n’existe généralement aucun recours. Par conséquent, vous
devez être très, très prudent(e), et vous assurer que vous stockez vos
crypto-monnaies de manière sécurisée. Ceci constitue une préoccupation
très sérieuse.”
Intéressons-nous aux
trois principales méthodes de stockage auxquelles ont recours les détenteurs de crypto-monnaies :
- Les plateformes d’échange et les “online wallets”
- Les “software wallets”
- Les “hardware wallets”
Stocker ses crypto-monnaies sur une plateforme d’échange ou un “online wallet”
S’il s’agit de la méthode
la plus pratique pour stocker ses crypto-monnaies,
c’est loin d’être la plus recommandable.
La plupart des plateformes d’échange et des “online wallets” ne garantissent pas les dépôts des utilisateurs.
Si celles-ci étaient un jour piratées, ou qu’elles décidaient de mettre
un terme à leurs activités pour se réfugier dans un pays ne pratiquant
pas l’extradition ,
vous risqueriez fort de ne jamais pouvoir les récupérer.
M. Paul a évoqué le stockage de crypto-monnaies sur
Coinbase,
qui constituerait l’une des exceptions à la règle. En effet, l’ensemble
des monnaies numériques que détient la société californienne pour le
compte de ses clients
sont assurées. Si un pirate parvenait à exploiter une faille de sécurité, ou si un des employés décidait de dérober les
coins appartenant aux clients de Coinbase,
ceux-ci pourraient demander à être remboursés.
Toutefois,
avec plus de 13 millions de clients,
on peut se demander si la société pourrait être en mesure de rembourser
l’ensemble de ses utilisateurs. Si chacun d’entre eux stockait en
moyenne sur son compte l’équivalent de 1000 euros, il faudrait que
Coinbase puisse être en mesure de verser à ses clients
plus de 13 milliards de dollars.
Pour en savoir plus sur la manière dont certaines plateformes sécurisent les fonds de leurs clients,
n’hésitez pas à consulter cet article qui présente
le dispositif de sécurité auquel a recours la plateforme Gemini.
Stocker ses crypto-monnaies sur un “software wallet”
Les “software wallets”, ce sont des
applications qu’il faut télécharger et installer sur son ordinateur ou son smartphone. Il existe de nombreux wallets de ce type, et
chaque crypto-monnaie propose généralement son propre portefeuille.
C’est d’ailleurs le principal problème lié à ces wallets. À l’exception de certains logiciels tels qu’
Exodus ou
Coinomi,
il existe peu de wallets “multi-devises” de confiance
sur lesquels il est possible de s’appuyer. Si vous ne possédez qu’une
ou deux crypto-monnaies, cela ne pose pas de problème, mais si vous
détenez plusieurs dizaines d’actifs numériques,
il peut être compliqué d’installer une multitude de portefeuilles différents sur son ordinateur.
Avec un wallet logiciel, vous pourriez
rencontrer des difficultés pour accéder à vos fonds.
Si vous oubliez votre mot de passe, ou que vous perdez votre
“seedphrase” ou vos clés privées, vous ne serez plus en mesure de
récupérer vos monnaies numériques.
Enfin, comme dans le cas d’un “online wallet”,
les risques de piratage existent. Votre ordinateur ou votre smartphone pourraient être infectés par un cheval de troie intégrant un
enregistreur de frappe.
Celui-ci pourrait offrir à un hacker la possibilité d’obtenir le
fichier correspondant à votre wallet, ainsi que le mot de passe
permettant de débloquer celui-ci.
Stocker ses crypto-monnaies sur un “hardware wallet”
Un
“hadware wallet”, c’est un périphérique qui contient un logiciel
permettant de stocker une ou plusieurs crypto-monnaies. Les plus connus
sont les modèles Ledger, Trezor et KeepKey. Il s’agit de ce que l’on
appelle des “cold wallet”, puisqu’ils ne sont
pas directement reliés à votre réseau internet.
Ces wallets permettent de bénéficier d’une
certaine praticité (vous n’avez qu’à renseigner un code PIN pour accéder à vos fonds), tout en bénéficiant d’une
grande sécurité (un pirate qui parviendrait à prendre le contrôle de votre ordinateur ne serait pas en mesure de dérober vos crypto-monnaies).
En
cas de perte de votre portefeuille, une “seed phrase” vous permettra de
récupérer l’accès à celui-ci. Il convient de la noter sur un support
papier, et de placer celui-ci à l’abri des regards indiscrets. Si vous
en avez la possibilité, il est recommandé de stocker ce support dans le
coffre-fort de votre établissement bancaire.
3. Les “risques de régulation”
D’après M. Paul, le dernier risque lié à l’achat de crypto-monnaies est un “risque de régulation”.
Les
lois qui encadrent les crypto-monnaies ne s’appuient pas sur des normes
internationales. Ce qui est légalisé dans une région du globe pourrait
être interdit dans une autre. On sait que certains pays,
comme le Zimbabwe, ont purement et simplement interdit aux citoyens d’avoir recours à ces actifs, tandis que d’autres,
comme la Biélorussie, ont décidé de légaliser les crypto-monnaies et les ICOs.
D’autres
pays comme les Etats-Unis, autorisent l’usage des monnaies numériques,
mais imposent un cadre réglementaire très strict aux ICOs – celles-ci
sont d’ailleurs réservées à quelques investisseurs accrédités.
Se pose ensuite
la question de l’imposition.
Si ces actifs ne sont pas considérés comme étant des monnaies, comment
vont-ils être taxés ? En France, depuis juillet 2014, les gains “tirés
de la vente d’unités de compte virtuelles stockées sur un support
électronique” :
- relèvent du régime d’imposition des bénéficies non commerciaux (BNC) lorsqu’ils sont occasionnels
- sont soumis à l’impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) lorsqu’ils sont habituels
Vous pensez toujours investir dans les crypto-monnaies ?
Quels
sont les enseignements que l’on peut tirer de cet entretien ? Voici nos
recommandations (nous nous sommes appuyés en partie sur celles évoquées
par le site Bitcoinist, qui a relayé cet entretien) :
1. Retenez que, dans l’écosystème des crypto-monnaies, rien n’est sûr.
Si vous êtes averse au risque, mieux vaut privilégier des actifs “traditionnels”, associés à des niveaux de volatilité bien plus faibles : actions, obligations, immobilier,…
Et
si vous comptez tout de même placer une partie de votre capital dans
les monnaies numériques, préparez-vous à ressentir des sensations fortes
:
comme nous l’avons vu hier, le Bitcoin est susceptible de
perdre le quart de sa valeur en moins de 24 heures.
2. Ne stockez pas l’ensemble de vos Bitcoins sur des plateformes tierces
Même s’il s’agit de plateformes qui nous semblent être dignes de confiance, elles sont, contrairement au réseau Bitcoin,
centralisées. Elles peuvent donc, à ce titre,
constituer un point de défaillance.
Celles-ci
“stockent” des BTC pour vous. Si elles venaient à fermer, ou à être
victime d’un piratage, vous pourriez perdre votre investissement, en
totalité ou en partie. C’est d’ailleurs ce qui était arrivé en 2016 aux
utilisateurs de Bitfinex – la plateforme avait ainsi décidé d’imputer le
vol dont elle avait été victime sur les soldes de ses clients.
La solution ?
Stockez la majeure partie de vos actifs numériques dans des portefeuilles dont vous détenez les clés privées – des portefeuilles papiers, logiciels ou matériels (ces derniers peuvent être privilégiés, car ils allient
praticité et
sécurité).
Pour en savoir plus sur la sécurisation de vos actifs numériques, n’hésitez pas à suivre les suggestions présentées dans
cet article (en anglais) proposé par le site Blockonomi.
3. Assurez-vous d’être en conformité avec les lois du pays dans lequel vous résidez.
En France,
la plupart des plateformes d’achat contraignent déjà les épargnants à dévoiler leur identité – et ceci devrait être obligatoire dès l’année prochaine.
Sachez par ailleurs que le ministre de l’Économie et des Finances
Bruno Le Maire a récemment indiqué qu’il comptait mener
des discussions autour de la régulation du Bitcoin lors de
la prochaine réunion du G20, qui se tiendra dès la fin du mois de novembre. Pour justifier cette décision, il a notamment expliqué qu’il était là “
pour garantir la sécurité des épargnants“.
Enfin, vous pouvez vous référer à cette règle qui prévaut dans le cadre de tout investissement financier :
il est fortement recommandé de ne pas investir plus que ce que vous pouvez vous permettre de perdre.
Certains observateurs suggèrent ainsi de
ne pas placer plus de 1, 2 voire 5% de son patrimoine dans les crypto-monnaies.
En dépit de ces règles de bon sens, certains épargnants décident d’y placer plus de 100% de leur capital…
en ayant recours à l’endettement pour financer leurs achats. C’est le cas de nombreux américains,
qui auraient contracté ces dernières semaines des prêts hypothécaires pour pouvoir acheter des Bitcoins.
N’hésitez pas à suivre Ari Paul
sur Twitter.
Cet
article ne constitue pas une recommandation d’investissement. Nous vous
suggérons de mener vos propres recherches avant de décider de vous
procurer des crypto-monnaies – des actifs extrêmement risqués. Ne
dépensez pas plus que ce que vous pouvez vous permettre de perdre. Nous
ne saurions être tenus responsables de toute perte en capital, en lien
avec la lecture de cet article.
Références :
Bitcoinist,
BusinessInsider
CAPTURE D'ÉCRAN ET SOURCE: https://www.crypto-france.com/risques-crypto-monnaies