jeudi 27 avril 2017

Ce que veulent les femmes millennials


Ce que veulent les femmes millennials
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Ce que veulent les femmes millennials

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Introduction
Comment les comportements des femmes millennials se diffusent dans la société et nous éclairent sur l’avenir ? Décryptage de Nelly Rodi et Marie-Claire.
Sont considérés comme millennials la génération Y cumulée à la génération Z, soit toutes les personnes nées entre 1980 et 2010. Ils représentent aujourd’hui 1/3 des actifs, ils constitueront la moitié de la population active d’ici 2020. La prochaine génération devrait s’appeler la génération Alpha.
Parmi les enseignements de cette étude, fruit d’une collaboration entre l’agence de prospective Nelly Rodi, Marie-Claire et GMC Media qui ont travaillé sur un panel de 1 000 femmes : 68% des millennials ne peuvent pas se passer de leur smartphone. 83% ont néanmoins besoin de se déconnecter de temps en temps.

Deux marqueurs générationnels qui les différencient des précédentes générations

La disruption technologique (ceux qui n’ont pas connu la vie sans internet) : force de la multitude, globalisation de la culture, économie collaborative, réseaux sociaux, personal branding, horizontalité du monde.
Les crises (ceux qui ont grandi dans le monde du 11 septembre 2001) : crise économique, réchauffement climatique, scandales sanitaires, précarité professionnelle, attentats de Paris.
Ce qu’il en ressort : tous ces crises ne sont pas considérées comme paralysantes  pour les millennials mais, au contraire, de par la disruption technologique, donnent envie de faire, d’agir. Cela induit de nouveaux comportements.

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Les millennials aiment se projeter en temps réel

Instant : les millennials aiment ce sentiment d’ubiquité et de projection instantanée. Aux marques de s’adapter : c’est le cas, notamment, de Snapchat Virtual Mirror, de L’Oréal Make Up génius, ou du casque de réalité augmentée Stereolabs Linq qui peut être utilisé aussi bien en intérieur qu’en extérieur grâce à une caméra 3D.
En outre, les millennials aiment sentir qu’ils ont la maîtrise du temps. Il leur est inimaginable aujourd’hui d’attendre un bus sans savoir dans combien de temps celui-ci arrive. Burberry répond à ces besoins avec See now by now (les looks du défilé sont immédiatement disponibles à l’achat) ; Fermob qui invite les internautes à découvrir les coulisses de son usine ; ou encore Kate Spade qui permet aux passantes d’acheter des produits 24h/24 grâce à une vitrine digitale.
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Les millennials savent que leur voix compte

Care : si les générations précédentes étaient dans la théorisation, les concepts, les millennials sont pragmatiques. Ils veulent faire et s’érigent en sauveurs du monde. La notion d’injustice leur est épidermique : pour eux, les notions de genres, de races n’existent pas. La mixité et la diversité des profils sont mises en avant, ainsi que que les conditions de production et la souffrance animale. De plus, ils sont réalistes, ils savent que leur voix compte. On assiste à un empowerment féminin avec des figures de proue comme Emma Watson ou encore Amandla Stenberg.
Une philosophie de vie répercutée dans la campagne Ikea, Zero Waste (apprendre à cuisiner sans déchets), le choix de PUF d’imprimer les livres à la demande, ou encore la campagne H&M, recycle your clothes.
Pour 91% des femmes de 15-34 ans, les questions autour de la survie de notre planète sont importantes (contre 96% des 35-49 ans).
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Les millennials sont des entrepreuneurs

Do (faire) : ils ont le profil d‘entrepreneurs, ce sont des makers, autonomes, indépendants. Ils ne refusent pas le management, mais ont besoin de leur espace de créativité. Plutôt que de leur dire comment faire, autant leur donner un but. Ils aiment expérimenter, certains ont d’ailleurs lancé, jeunes, leur marque de prêt-à-porter. 44% des femmes de 15-34 ans aimeraient être leur propre patron, avoir leur propre activité (contre 60% des 35-49 ans). Dans les salons, des espaces importants sont désormais réservés à l’artisanat, au savoir-faire. Le collaboratif tient également une place importante : office riders, festivals comme We Love Green, Schoolab et incubateurs ont la part belle.
56% des femmes de 15-34 ans ont déjà participé à une collecte de fonds qui leur tient à cœur (contre 59% des 35-49 ans).
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Les millennials aiment être en communauté

Squad : les millennials aiment être en communauté, le ‘faire ensemble’ : à plusieurs on est plus fort pour affronter le monde. Cette pensée du collectif s’applique également à leur relation aux marques, qu’ils s’approprient et jugent comme leurs égales. Ils sont tout à la fois contributeurs, ambassadeurs, acheteurs, et parfois même actionnaires ! Des team-building se créent sous différentes formes : en couple, comme quand Stromae présente sa collection avec sa compagne ; ou en tribu, comme la L’Oreal League où 15 influenceurs ont remplacé l’égérie. 75% des femmes de 15-34 ans, aimeraient d’ailleurs participer à la co-création de services ou de marques (contre 74% des 35-49 ans).
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L'humour, leur arme de dérision massive

Fantasy : avec leur ironie, ils bousculent les paroles ambiantes. Il y a une touche d’irrévérence chez les millennials. De plus, ils ont l’esprit gamer : inutile de leur faire cumuler des points via une carte fidélité, les millennials veulent être surpris et de manière instantanée. 83% des femmes de 15-34 ans, apprécient que les marques ne se prennent pas au sérieux (contre 82% des 35-49 ans). Les Millennials maîtrisent les codes et les conventions pour mieux les détourner et jouer avec. Ils aiment le décalage et ainsi faire passer des messages. Ils considèrent l’humour comme un nouveau langage, rempart à la morosité ambiante, une façon de déstabiliser « l’establishment ».
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Ils se montrent mais maîtrisent leur contenu

Show/ not show : les Y ont été les premiers à exposer leur vie sur les réseaux, avec souvent quelques déconvenues… ils ont découvert le FOMO et créé le personal branding. Les Z sont beaucoup plus vigilants sur les contenus qu’ils partagent : pour eux chaque réseau a sa fonction et son usage spécifique. Ils prennent largement part au jeu mais en maîtrisent les codes mieux que personne, quitte à se déconnecter des réseaux, s’ils se sentent contraints par leurs règles. 25% des femmes de 15-34 ans, admettent publier plus fréquemment du contenu sur les réseaux sociaux depuis trois ans  (contre 35% des 35-49 ans). Pour autant, elles maîtrisent mieux leur diffusion, à l’exemple de l’instagrameuse star, Essena O’ Neil, qui, en plein succès, a pris la décision de fermer son compte : elle dénonce l’impact négatif des réseaux sociaux et les dérives de l’autopromotion. Pour autant, les behind the scenes, n’ont jamais été aussi relayés : les internautes s’affichent au naturel, dévoilent l’envers du décor, diffusent des making off.
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Premier driver de demain : la passion

Les millennials sont créatifs, ils mélangent les motifs sans souci. Les notions de bon goût et de mauvais goût n’existent plus. Ils ont un parti pris, jouent avec l’alternatif, tout en revendiquant leur singularité : ainsi il n’est pas rare de voir le look grunge se mélanger au bourgeois. 78% des femmes de 15-34 ans, sont prêtes à personnaliser un produit pour avoir quelque chose d’unique  (contre 75% des 35-49 ans).

Second driver de demain : Trans

On assiste à la fin des genres et au-delà des notions générationnelles. 96% des femmes de 15-34 ans apprécient que les médias affichent des physiques et des personnalités différents des codes classiques  (contre 75% des 35-49 ans).
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Troisième driver de demain : Hack

Ils connaissent parfaitement le système et ses failles. Lorsqu’il voit que celui-ci dysfonctionne, ou ne leur apporte pas la liberté souhaitée… ils le ‘hackent’ pour répondre aux vrais besoins. Les millennials se réattribuent les codes, changent les choses. Les marques adoptent un mode d’esprit disruptif : elles se réinventent, hackent les lieux, les logos. Cas flagrant : Donatella Versace, nouvelle muse de Givenchy.
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Décomplexés, connectés, malins et en dehors des institutions, sans pour autant être en rupture avec le système, les Millennials proposent des solutions qui répondent à des besoins, rapidement adoptées par les autres générations.

Orange Bank: la vraie disruption de la banque de détail est-elle en marche?


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Orange Bank: la vraie disruption de la banque de détail est-elle en marche?

Par Pierre Guimard, directeur associé de Keley Consulting

Par | le 26 avril 2017 | 
 Le monde de la banque restait en France à l’écart d’une vraie transformation digitale. Si les solutions de paiement alternatives se sont multipliées, les innovations des banquiers établis se contentent souvent de relooker la banque d’antan sans en changer les fondamentaux. Annoncée dans le spectaculaire Show Hello d’Orange de Stéphane Richard, Orange Banque pourrait être la disruption que le marché attend depuis longtemps. Plusieurs raisons à cela.  

Un projet enfin centré client 

La force d’Orange c’est de repenser la fonction bancaire sans raisonner comme un banquier. Sans auto-limitation. Sans schéma préconçu. Sans les contraintes non plus liées à des systèmes d’information encore anciens. Orange apporte deux valeurs essentielles au client: la simplicité et l’instantanéité. La création de compte se fait par simple scan de documents, ce qui n’est pas nouveau mais appréciable. 
L’envoi d’argent peut s’effectuer par SMS de façon instantanée. Cette fonction a été testée depuis longtemps dans les filiales africaines d’Orange qui sont souvent pour l'opérateur une pépinière d’innovation. La banque se gère sur mobile avec des fonctions qui séduiront, comme le blocage et déblocage temporaire d’une carte de paiement en cas de perte.  
En matière de service client, Orange banque s’appuie sur l’intelligence artificielle de Watson, permettant un service 24h sur 24. Le client aura cependant le choix de s’adresser à un conseiller physique avec 140 guichets en France situés dans les agences Orange. Ce modèle mixte est un atout important d’Orange Banque. Le client bancaire va rarement en agence mais souhaite disposer de cette possibilité.

Une banque (presque) gratuite

Les offres low cost ont prouvé leur attractivité auprès de larges segments de clientèle, le succès du compte Nickel en atteste. Nouvel entrant, Orange peut oser la gratuité sans cannibaliser d’offre existante. 
L’opérateur télécom peut aussi bénéficier d’une structure de coût beaucoup plus avantageuse que ses concurrents traditionnels: pas d’agences propres, une relation client optimisée et des systèmes d’information probablement largement moins chers. 
Le choix de la gratuité doit se comprendre dans un cadre plus large. Orange Banque permettra de renforcer la relation avec les clients sur les activités de téléphonie traditionnelle, tout en ouvrant l’accès à de nombreux services complémentaires.  

La puissance d’Orange 

De nombreuses start-up ont tenté de disrupter le modèle bancaire mais sans réellement inquiéter l’industrie. Fragiles, ces projets se contentent souvent d’occuper un segment limité de la chaîne de la valeur.  
Avec Orange, on joue dans une autre cour. L’opérateur dispose d’un capital confiance considérable, un facteur clé pour séduire des clients par définition prudents quand il s‘agit d’argent. 
La force de frappe commerciale d’Orange par ses agences, par ses canaux digitaux surtout permettra de faire la différence. Enfin, Orange dispose d’une capacité d’investissement considérable, un chiffre de 100 millions étant évoqué par Stéphane Richard sur plusieurs années.  

Des relais d’innovation à trouver

La banque sera disponible pour les salariés d’Orange en mai, dans les mois qui suivront pour le public. Il faudra une grande force de conviction pour faire venir des clients souvent peu satisfaits de leur banque mais résignés et procrastinant devant les formalités de transfert de compte. 
Une offre compétitive en matière de prêts immobiliers sera nécessaire car c’est souvent le premier contact entre une banque et ses nouveaux clients. La technologie d’Orange, et notamment sa connaissance du big data, pourraient faire la différence sur ce sujet, avec un meilleur scoring du risque que les acteurs classiques.  
Sur le reste de l’offre, les opportunités sont nombreuses car les produits bancaires actuels sont souvent complexes, peu personnalisés et assez confus pour le client. 
Les enjeux d’exécution seront évidemment clés pour Orange. L’exemple de Simple Bank, lancée en 2012 aux USA, montre qu’une innovation ne suffit pas à balayer le marché, si l’offre est insuffisante et si surtout l’expérience utilisateurs reste moyenne.
  • Le contributeur:
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Pierre Guimard est  directeur associé de Keley Consulting.
 
 
 
Lire aussiDjingo, IA, Orange Bank…Les 5 annonces à retenir du Show Hello d’Orange

De l’entreprise du père à l’entreprise des pairs

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De l’entreprise du père à l’entreprise des pairs


Publié le 26/04/2017 Frédéric Therin http://www.influencia.net


Très impliqué dans la réflexion sur le management stratégique, Isaac Getz a fait grand bruit quand il a avancé que redonner leur liberté aux salariés serait une idée à creuser, voire à prendre au sérieux, car de leur bien-être découle le bonheur de l'entreprise. Isaac Getz n'est pas un chercheur de l'ombre, il a aujourd'hui la réputation d'être le grand manitou des patrons libérés et le conseiller particulier d'acteurs du CAC 40. Un invité incontournable.

Docteur en psychologie et professeur à ESCP Europe, Isaac Getz vient de publier chez Flammarion un ouvrage baptisé "La Liberté, ça marche". Il y commente les textes de leaders libérateurs qui peuvent aider les dirigeants d’entreprise à trouver leur propre méthode de libération adaptée à leur structure. Cette transformation radicale du modèle managérial trouve un écho très important dans l'hexagone. Le livre précédent de ce spécialiste qui a été traduit en huit langues, Liberté & Cie, s’est vendu à plus de 30 000 exemplaires en France.


INfluencia : les entreprises sont de plus en plus nombreuses à ressentir le besoin de se transformer pour répondre aux nouvelles attentes de leurs clients et de leurs salariés. Comment expliquez-vous ce phénomène ?

Isaac Getz : nous vivons dans un monde « VUCA », l’acronyme anglais pour dire plein de volatilité, d’incertitude, de complexité et d’ambiguïté. Ce monde challenge l’organisation héritée de la révolution industrielle. Lorsque les paysans sont arrivés dans les usines, ils ont eu besoin d’être accompagnés et une solution mathématique s’est imposée. La « bureaucratie hiérarchique », qui permet d’encadrer le maximum de personnes avec un minimum de managers, est un modèle basé sur la hiérarchie et sur des procédures qui dictent aux salariés comment travailler. Ce système s’est révélé très efficace et même magnifique. Des études montrent en effet que le niveau de vie dans les pays développés qui ont épousé ce modèle a été multiplié par 25 entre 1825 et 2001, alors qu’il n’a progressé que de 60 % dans le reste du monde. Ces dernières années, ce système a toutefois commencé à révéler son pendant sombre : cette fâcheuse tendance qu’il a de déresponsabiliser et d’infantiliser les salariés puisque leurs supérieurs leur disent constamment quoi faire.

Dans le monde occidental, la majorité des salariés s’avouent aujourd’hui désengagés. En France, ce pourcentage atteint même les… 91 % ! Les gens vont au travail à reculons et jugent leur emploi juste comme un moyen de gagner de l’argent ; leur vie est ailleurs que dans l’entreprise.


IN : quand les sociétés ont-elles pris conscience de cette évolution ?

IG : à partir de 2005. Lorsqu’elles ont ployé sous le poids de trois pressions distinctes. La demande n’a ainsi jamais été aussi volatile et instable. Les générations Y et Z qui sont arrivées sur le marché du travail ne veulent plus, quant à elles, intégrer « l’entreprise du père », mais « l’entreprise des pairs », ce qui implique un changement de modèle pour les employeurs. La pression des technologies inquiète également les sociétés qui se demandent si elles ne seront pas le prochain « ubérisé » à être mangé. Le modèle de « bureaucratie hiérarchique » est manifestement incapable de répondre à ces tendances fortes et pose la question d’un mode d’organisation différent. D’ailleurs, ce phénomène concerne toutes les entreprises, je n’en vois aucune qui pense pouvoir continuer de travailler comme par le passé. Même l’administration et l’armée ont compris qu’elles devaient se transformer.


IN : comment aujourd’hui l’entreprise peut-elle faire sa mue ?

IG : il y a actuellement des expérimentations qui vont dans tous les sens. Certaines sociétés optent pour le modèle participatif, d’autres préfèrent le système collaboratif. Moi, j’étudie particulièrement les entreprises libérées. La libération d’entreprise n’est pas un modèle ou une méthode qu’il suffit d’appliquer. Il s’agit plutôt d’une philosophie qu’un patron libérateur articulera autour de l’héritage humain et culturel de sa société. L’objectif est de permettre aux salariés d’utiliser leurs talents et de s’autodiriger.


IN : quels déclics encouragent un dirigeant à « libérer » sa société ?

IG : ils sont doubles. Le premier est économique. Certaines entreprises – qui enregistrent de mauvais résultats ou n’ont aucun horizon au-delà de trois ans – savent qu’elles sont en danger et qu’elles doivent modifier leur mode organisationnel. Le second se déclenche dans l’esprit des dirigeants. L’un d’entre eux m’a expliqué un jour qu’il en avait assez de vivre avec ses deux « moi ». Le « moi personnel » – qui comprend des valeurs qu’il applique à sa famille et à ses amis – était en perpétuel conflit avec son « moi professionnel ». Ne voulant plus vivre avec cette rupture, il a choisi de construire un mode organisationnel en adéquation avec son « moi personnel ».


IN : quelles sont les étapes à franchir pour libérer son entreprise ?

IG Il n’y a pas de modèle préétabli. Il faut dans un premier temps réunir l’ensemble des salariés pour définir les valeurs clés autour desquelles les gens veulent être animés. On leur demande ensuite d’indiquer les symboles et les pratiques organisationnelles qui ne sont pas en phase avec ces valeurs, et de les transformer en nouvelles façons de travailler qui le soient. Certaines solutions ne marcheront pas forcément ni tout de suite, ni bien. Il est donc nécessaire de les faire évoluer. Cette transformation prend du temps, mais elle fonctionne. En France, des centaines de PME comme FAVI, Bretagne Ateliers, Chrono Flex, Poult ou Biose se sont déjà libérées. De grands groupes, dont Airbus, Décathlon et Michelin, se sont aussi lancés dans cette métamorphose. C’est le cas également de certaines administrations et d’unités militaires. D’ailleurs, la France est le seul pays où il existe un vrai mouvement de libération d’entreprises.


IN : pourquoi ?

IG : pour deux raisons. D’un côté, un écosystème de la libération – comprenant notamment d’autres leaders libérateurs (des coachs, des juristes et même des fonds d’investissement) – s’est développé au fil des ans et ces spécialistes aident aujourd’hui les dirigeants à avancer plus sereinement dans leur processus de transformation de leur entreprise. De l’autre côté, la France a accumulé un certain retard en matière d’organisation managériale. Si notre pays se situe à la 22e place du classement des nations les plus compétitives établi par le Forum de Davos, nous sommes 116e dans le domaine de la qualité des relations entre les employeurs et leurs salariés, et 51e dans la volonté du management de déléguer… Nous nous trouvons ainsi juste derrière le Lesotho et devant la Mauritanie pour le premier indicateur… Quand on a très faim, on est davantage attiré par un plat de « libération »…


IN : libérer son entreprise ne crée-t-il pas des tensions au sein du personnel ?

IG : les études psychologiques montrent que l’être humain aime avoir des responsabilités et prendre des décisions sans l’aide de quiconque. Il est contre- nature de vivre sous un plafond de verre et de ne pas avoir de liberté et de responsabilité. Si travailler pour une entreprise libérée peut créer une certaine incrédulité chez les collaborateurs au début, la plupart sont ensuite très satisfaits de cet environnement. Un climat de confiance et de liberté d’action favorise la prise d’initiative et encourage la réalisation de soi. Les salariés ainsi s’engagent davantage et ressentent plus de plaisir au travail. Seule une petite minorité de personnes, qui ont été infantilisées trop longtemps, peuvent avoir des problèmes à s’adapter.

Les dirigeants, qui sont habitués au pouvoir de dire et de contrôler, doivent, quant à eux, se transformer en leaders serviteurs. Cela ne va pas sans un travail sur soi via un coaching, voire une psychanalyse, mais la plupart des patrons parviennent à s’adapter, car leur objectif final est d’assurer la pérennité de l’entreprise.

Beaucoup de managers ont, en revanche, l’impression que le sol se dérobe sous leurs pieds quand leur société se libère. En passant d’opérationnels à facilitateurs, ils redoutent de perdre leur raison d’être. Leur rôle n’est plus de contrôler, mais d’être au service de leurs équipes afin qu’elles donnent le meilleur d’elles-mêmes. C’est un énorme changement.


IN : ne vaut-il donc pas mieux transformer son entreprise moins radicalement sans la « libérer » totalement ?

IG : le débat autour de cette question existe depuis longtemps, mais le modèle de « bureaucratie hiérarchique » a aujourd’hui atteint ses limites. Les entreprises cherchent en conséquence à se transformer de manière radicale et il n’est pas possible de donner seulement « un peu » d’autonomie aux collaborateurs.


IN : pensez-vous en conséquence que de plus en plus de sociétés vont se libérer dans les années à venir ?

IG : je le crois et le constate. De plus en plus de dirigeants de société, mais aussi des administrations et des unités militaires, souhaitent me rencontrer pour parler de ce thème. Certains signes montrent que les choses sont en train de bouger. Tous les autres acteurs de l’écosystème de la libération d’entreprise sont également de plus en plus consultés. En décembre 2015, nous avons organisé à Nantes un campus sur ce thème et les 500 places proposées ont été réservées en trois jours. Les journaux télévisés de TF1 et France 3 ont traité de ce sujet, tout comme les émissions Envoyé spécial, Complément d’enquête, Tout compte fait ou Capital. Le Parisien en a fait sa Une et Le Monde y a consacré un dossier. Tout cela montre que ce thème intéresse de plus en plus le monde de l’entreprise.