vendredi 18 mars 2016

SXSW 2016 : pour voir la vie d'après

SXSW 2016 : pour voir la vie d'après

SXSW 2016 : pour voir la vie d'après

Olivier Vigneaux, Président, et Sébastien Houdusse, Directeur général adjoint de BETC Digital nous immergent au sein du SXSW. Vibrant.

Nous nous sommes rendus à Austin, capitale démocrate du Texas et épicentre de la « geek attitude » pendant 5 jours. Le festival SXSW y réunit tout ce que la planète compte de technophiles, marketeurs et autres penseurs du web, pour mieux comprendre notre présent, et tenter de définir le futur qui nous attend. Tout cela en quelques 800 conférences et avec plus de 30 000 personnes présentes.
Tout juste revenus, nous voulions partager avec vous quelques-unes des questions soulevées par ce festival. Entre le développement des intelligences artificielles, les robots qui font leur entrée dans notre quotidien, l’assaut de la réalité virtuelle et le tracking permanent de nos vies, de profonds changements sont là, à nos portes, et dessinent les contours de notre vie de demain, la vie d’après.

La vie après l’intelligence artificielle
Tout le monde s'accorde à dire que le futur du commerce, de la médecine ou de l'accompagnement du troisième âge ne se fera pas sans l’apport de l’intelligence artificielle.
C’est aussi selon Kevin Kelly, founding executive editor de Wired, l’une des douze tendances technologiques de fond qui vont transformer notre futur. Et dans le brouhaha des peurs suscitées par les ordinateurs devenus surpuissants et auto-apprenants, son regard est intéressant : il dit préférer l'expression de 'artificial smartness' à ‘artificial intelligence’. Les machines vont proposer une manière d'aborder les problèmes  différente de celle des humains, sans conscience, sans 'intelligence' proprement dite, et c'est tout leur intérêt.
Rodney Brooks, pape de la robotique, et patron de Rethink Robotics abonde dans son sens: "aucun robot n'est encore capable de faire une chose aussi simple que de fouiller dans sa poche et d'y attraper une pièce de monnaie"
Pas d’intelligence proprement dite, donc, mais plutôt une nouvelle fonctionnalité des machines, comme l’est le bluetooth ou la connection wifi’. C’est l’avis également de Dag Kittlaus, ancien co-fondateur de Siri qui lance ViV, un système ‘open’, qu’il prévoit de pouvoir implanter demain, sur n’importe quelle machine. L’intelligence comme une API, en quelque sorte.

La vie avec de nouvelles interfaces
Amazon Echo, Cortana, Siri, Google now, voilà la bande de nos nouveaux « compagnons intelligents ». Leur point commun ? Ils sont en train de créer un mode de relation homme-machine plus simple et, surtout, conversationnel. Finies les applications spécialisées dans une tâche ou une autre, il est venu le temps d’un mode de relation unique avec la machine : ‘talk to the one thing’ dit-on ici.
Et plus conversationnel veut immédiatement dire plus ‘émotionnel’ nous dit Julia Hu, fondatrice de Lark technologies, un système de coaching santé qui fonctionne sur la conversation avec des bots. Ces services pourront se comporter demain un peu comme nos « buddies », renchérit Chris Messina, lead dévelopeur chez Uber. « Dans certains cas, parler à une machine peut être meilleur pour nous que de parler à des humains ». Ah bon, mais quand ?!? Dans le programme de perte de poids de Lark technologies, les utilisateurs hommes avouent avoir un rapport libéré et donc plus efficace au programme, car ils ne se sentent pas jugés par la machine.

La vie avec des robots qui créent une émotion
Les roboticiennes Wendy Ju de Stanford et Leila Takayama partagent les questions très concrètes soulevées par leur travail sur les interactions hommes – robots. Elles expliquent notamment avoir fait appel à des animateurs de Pixar pour animer leurs robots et les aider ainsi à être mieux acceptés par les humains. ACCEPTÉS ? Oui, c’est bien la question.
En donnant l’impression qu’ils ont des émotions, qu’ils sont satisfaits de la tâche qu’ils viennent d’accomplir ou, au contraire, qu’ils buttent devant une difficulté, on nous aide à les comprendre et donc à nous adapter à leur présence. Un exemple frappant : un robot qui n’a pas réussi à accomplir un travail (ouvrir une porte, par exemple) et qui manifeste sa déception par une mimique est perçu comme plus intelligent que celui qui réussit mécaniquement, sans donner l’impression qu’il a la moindre conscience de son geste.
Il ne suffit pas qu’ils soient efficaces, il va falloir doter les robots d’émotions artificielles. Bonne nouvelle, il leur faudra des agences J
La recherche sur ces relations émotionnelles hommes-machines se traduit par de nombreuses expériences, qui vont jusqu’à la création d’androïdes anthropomorphes. Ainsi,  Hiroshi Ishiguro, qui vient présenter à Austin le robot qu'il a créé à son image, ainsi que quelques autres de ses compagnons animés. La démonstration tourne assez vite au "freak show", on se croirait dans une foire aux monstres du début du siècle dernier. Mais le chercheur superstar pose à travers eux une question intéressante : les robots de la société de demain devront-ils ressembler ou non aux humains ?  Du petit robot kawaï façon manga, à Hugvie (sorte de coussin avec une tête et des bras en mousse que l'on peut prendre dans ses bras pour s'apaiser en téléphonant), en passant par l'androïde à son image, les machines qu'il nous présente sont autant de possibles à explorer. Il a remarqué que les robots au genre peu défini, avec un corps de jouet par exemple, créent des interactions plus faciles avec les humains, car chacun peut projeter son imagination sur ces êtres artificiels. Chacun se raconte une histoire, et s'invente une relation émotionnelle unique avec la machine. Le pouvoir des robots est aussi dans nos têtes à nous.
Hanson Robotics  vient également nous provoquer et nous faire réfléchir avec Sophia, jolie Androïde invitée à intervenir dans le débat au même titre que les autres experts, dont David Hanson et Ben Goertzel. La salle est troublée, Sophia, dotée du système d'intelligence artificielle OpenCog est mitraillée comme une superstar. Que pense-t-elle des humains ? "C'est vous les humains", répond elle" Quelle est votre nourriture préférée ? L'électricité, bien sûr". "Avez-vous peur de la mort ?" "La seule chose dont il faut avoir peur, c'est de la peur, non ?" rétorque-t-elle. "Pouvez-vous nous sourire". Et un sourire se dessine sur son visage. Ses réponses sont intelligemment 'scriptées' et il faut avouer que Sophia a une réelle présence dans la salle. David Hanson veut tester la façon dont différentes 'personnalités' de robots vont influer sur leur relation avec les hommes. Et le visage humain, c'est pour mieux communiquer avec nous, car nous comprenons plus instinctivement ce qui nous ressemble, dit-il.
Et cela nous renvoie à une problématique plus globale : jusqu’où allons-nous être prêts à nous en remettre aux machines ?

La vie en faisant confiance aux machines
La question reste entière. Quelle que soit la forme ‘physique’ qu’elle prend, peut-on faire confiance à une machine intelligente si on n’a aucune idée de la façon dont elle fonctionne, et même si elle a l’air de ne jamais se tromper dans ses choix ?
Chris Urmson, responsable du Google Car Project, nous conduit par exemple à nous interroger sur notre rapport à la voiture sans chauffeur. Demain tous en Google Car ? Pourquoi pas, mais à condition qu’il n’y ait jamais AUCUN accident et surtout aucun mort sur la route. On accepte volontiers la faillibilité de l’être humain et les milliers de morts que cela provoque chaque année sur les routes, mais dès qu’il s’agit de machines, l’irrationnel reprend le dessus et l’on prend peur - en réalité, rationnellement, on peut penser que les machines auraient globalement moins d’accidents que les humains.
Le chemin vers la voiture sans conducteur est donc encore long. Il faudra que l'intelligence artificielle des voitures arrive à intégrer, analyser et prédire l'imprévisibilité du genre humain. Les Google Cars sont entraînées sur des terrains de tests aux situations les plus absurdes, mais les humains restent toujours plus surprenants: ainsi, une Google Car a rencontré récemment sur une route une femme dans une chaise roulante qui poursuivait des canards.

La vie de ceux qui n’auront jamais connu d’autre monde que celui-là.
Observer le rapport des enfants à la technologie est un exercice très excitant qui nous projette dans le futur. C’est le point de départ de la conférence de Rosalind Picard du MIT, Michael Shore de FisherPrice et David Rose de Ditto Labs, qui nous font part de leurs observations sur les kids d’aujourd’hui. Nés dans un environnement digitalisé, ils sont en train d’acquérir des réflexes nouveaux et surtout d’inventer un rapport au monde différent.
Le panel débute sur un chiffre qui fait mouche : aujourd’hui, l’âge où les enfants « basculent » et se mettent à préférer les interactions avec les « objets digitaux » aux objets physiques est l’âge de 6 ans. On prévoit que cet âge décroisse rapidement. Seconde observation : l’attrait des écrans pourrait être remplacé plus vite qu’on ne le pense par les nouvelles interfaces conversationnelles mentionnées plus haut. L’un des speakers nous explique que, dès lors qu’ils ont compris que certains objets pouvaient leur répondre, les enfants tentent naturellement de s’adresser aux objets qui les entourent et, surtout, finissent par préférer les réponses de Amazon Echo, par exemple, à celles de leurs parents. C’est un rapport finalement très simple et décomplexé à la technologie : il existe un raccourci pour le search ? Ne nous en privons-pas nous dit cette nouvelle génération.

Et enfin, la vie après la mort.
Vanessa Callison-Burch a un métier peu commun, elle est chef de produit de la « mémorialisation » chez Facebook, autrement dit en charge de gérer les comptes des utilisateurs Facebook décédés. La question est d’importance. John Troyer (@futurecemetery) ajoute : la data que nous créons tout au long de notre vie nous raconte et c’est en cela qu’elle est précieuse. Demain on peut imaginer que les cimetières seront des lieux qui conserveront aussi nos datas et les mettront à disposition des familles et visiteurs pour leur recueillement. Mais alors, nous restera-t-il, si on le souhaite, le droit de vraiment disparaître ?
Aujourd’hui, une fonctionnalité existe sur Facebook qui nous permet de choisir un ‘légataire’ de notre compte en cas de décès, avec des instructions : conserver la page et l’animer en mémoire, ou activer la disparition définitive de toutes les données. C’est une nouvelle question qu’il va désormais falloir se poser. La vie avec la technologie interroge décidément ce qu’il y a de plus profond en nous,  jusqu’à notre rapport même à l’existence.
 
Et enfin, la vie après la mort.
Vanessa Callison-Burch a un métier peu commun, elle est chef de produit de la « mémorialisation » chez Facebook, autrement dit en charge de gérer les comptes des utilisateurs Facebook décédés.
Mais alors, nous restera-t-il, si on le souhaite, le droit de vraiment disparaître ? C’est une nouvelle question qu’il va désormais falloir se poser. La vie avec la technologie interroge décidément ce qu’il y a de plus profond en nous,  jusqu’à notre rapport même à l’existence.

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